Lui face à elle.
Lui face à moi.
Lui face à nous.
C'est assez horrible de constater la pauvreté
Quand tout de suite après, ce sont des riches qu'on s'en va côtoyer.
Lui, qui se promène en chaussons morts,
Fouillant dans les poubelles de l'arrêt des bus.
Elle, qui se plaint encore et encore
Quand elle a tout, oh ma pauvre petite puce.
Il ne demande rien, il a sa fierté mais aussi ma pitié.
Seul face à lui je ne peux que nous questionner.
Elle fait celle qui de son argent pourrait bien se passer,
Mais c'est faux, elle me fait tout autant pitié.
Il nous paraît être dans un autre monde,
Celui que l'on connaît a dû le renverser.
Ce contraste d'univers est immonde,
Mais à quoi bon cette avalanche de larmes versée ?
Allongé sur du carton,
Son chien faisant le planton :
Ce sont ces images qui
Nous hanterons cette nuit.
Noirci par la vie,
De dehors, de dedans.
Il dévie sans envie
Au gré du vent grandissant.
Allant payer pour quitter le parking, il m'attend, évidemment.
Il me demande de l'argent, je lui dis « j'en ai pas » donc je mens.
Admettons que j'accepte de lui donner la piécette,
Pour paraître gentil, je lui parle du temps :
« Il fait beau aujourd'hui », lui qui rage dans sa tête
Et j'ajoute bêtement « c'en est même plaisant »
Sans penser un instant que dehors il y vit,
Que personne ne lui a demandé son avis.
Nuits à la belle étoile, ça les interpelle quand on trouve ça romantique.
Pour eux c'est moche quand c'est sans romance et sans fric.
Plus rien à perdre à part peut-être les outils pour vivre,
Souvent pour se réchauffer, oublier, s'amuser, regretter, ils restent ivres.
On essaie de les comprendre,
On croit parfois que c'est un choix,
Mais si c'était le jeu de l'oie,
Dis toi bien qu'ils voudraient se rendre.
Alors je quitte le parking dans ma voiture, ma berline,
En le voyant ainsi assis par terre, six pieds sous terre je l'imagine.
J'y pense un instant, puis j'oublie et m'en moque.
On ne se souvient d'eux que quand ils nous choquent, que lorsqu'ils nous provoquent.
Allongé sur du carton,
Son chien faisant le planton :
Ce sont ces images qui
Nous hanterons cette nuit.
Noirci par la vie,
De dehors, de dedans.
Il dévie sans envie
Au gré du vent grandissant.
Nous sommes quatre ou cinq, on est bien, on est jeune.
Le sourire aux lèvres, des blagues qui fusent, on s'en va déjeuner.
On le croise, on s'en fout totalement mais lui, lui il jeûne.
Bien que forcé, il se dit : « c'midi j'vais pas manger » et ça a tout changé.
On va dans un macdo mais ils n'ont plus de potatoes,
Alors pour s'excuser, ils nous offrent des bigmac en plus, ça nous console.
Son seul plaisir est celui de fumer une cigarette trouvée sur le sol.
Il n'a rien, on a tout, et pourtant de se plaindre on ose.
Son ventre gargouillant lui tire un flot de larmes.
On se permet de dire « mais quel vacarme !! »
Le chien se place sous la tête de son maître
Pour s'hydrater grâce à la tristesse, non mais sale traitre.
Allongé sur du carton,
Son chien faisant le planton :
Ce sont ces images qui
Nous hanterons cette nuit.
Noirci par la vie,
De dehors, de dedans.
Il dévie sans envie
Au gré du vent grandissant.
A lui, à lui, à lui, ne nous croyez pas quand on vous dit qu'on est « désolé »
On ne préfère pas l'idée de vous voir riches et de nous voir dans la pauvreté.
A elle, à moi, à nous, n'êtes-vous pas indignés par vos comportements ?
N'auriez-vous pu leur faciliter la vie ne serait-ce qu'un instant ?
…
…
Égocentrisme, Individualisme, caractéristiques de l'homo oeconomicus,
Comprenez juste que nous sommes mauvais, l'homme est un méchant gus.
[12/06/09]